lundi 16 février 2015

David Foenkinos - Charlotte

Ce livre aura eu le mérite de me faire découvrir Charlotte Salomon. A défaut de me charmer. Je n'ai jamais trouvé Foenkinos aussi mauvais. Je ne saurais pas dire ce qui lui est passé par la tête. Il a radicalement changé de style. Je le connaissais léger, drôle, avec quelques jolies trouvailles qui vous arrachaient un sourire au détour d'une phrase. Ici, le style est désespérément plat.
Il s'attaque dans ce roman au genre biographique pour nous raconter l'histoire de Charlotte Salomon, une peintre allemande juive qui mourut à l'âge de vingt-six ans à Auschwitz en 1943 alors qu'elle était enceinte. On sent qu'il peine à trouver la forme qu'il donnera à son livre, il le dit d'ailleurs à quelques reprises, peut-être dans les seuls moments du livre qui trouvent un peu grâce à mes yeux (j'ai pensé : enfin, il arrête -un peu- de se la jouer).

"J’ai tenté d’écrire ce livre tant de fois. 
Mais comment ? 
Devais-je être présent ? 
Devais-je romancer son histoire ? 
Quelle forme mon obsession devait-elle prendre? 
Je commençais, j’essayais, puis j’abandonnais. 
Je n’arrivais pas à écrire deux phrases de suite. 
Je me sentais à l’arrêt à chaque point.
 Impossible d’avancer."

Le gros souci, à mon avis, c'est que nous aussi on se sent à l'arrêt à chaque point. Pourquoi écrire ces phrases courtes qui ressemblent à des vers mais qui n'en sont pas ? Est-ce une forme de snobisme ? Le texte n'a rien de poétique. Il décrit, il enfile les informations sur la vie de Charlotte comme des perles. En en soulignant bien le côté sordide. De temps en temps, il plaque des sentiments sur son personnage. Il admire cette artiste, cela ne fait aucun doute. Mais cela le paralyse. Il y a des gens qui nous subjuguent mais ce sentiment est tellement puissant que ce qu'ils nous font ressentir se situe au-delà des mots. Il me semble que c'est le drame de Foenkinos dans ce livre. Il fait d'une artiste certainement fascinante un personnage de roman somme toute médiocre. Il ne nous donne pas accès à une reconstruction transfigurée par les mots, qui nous donnerait à voir Charlotte plus vraie que nature. Ici, Charlotte est née sous le signe de la tragédie : un nombre impressionnant de membres de sa famille se sont suicidés. Malgré de vagues lueurs tremblotantes, son existence n’accédera jamais vraiment à la lumière. C'est dommage car j'ai le sentiment qu'il aurait pu émaner de cette histoire un saisissant clair-obscur. C'est un hommage raté et il me semble qu'on ne se serait pas privé de souligner la pauvreté de l'écriture s'il s'était agi d'un autre auteur. Ca ressemble à un mauvais mémoire de maîtrise. On ne sait pas où il va, il n'a pas de projet d'écriture bien défini. Il retrace la vie de Charlotte. Wikipédia l'a fait avec plus de concision et d'efficacité. C'est dommage, car tout ce que j'apprends sur Charlotte Salomon me laisse entendre qu'il y aurait eu moyen de faire un beau roman sur elle. Je pense à Alabama Song de Gilles Leroy qui est autrement plus réussi.

Cela dit, ça reste une expérience édifiante : ce n'est pas parce qu'un écrivain fait preuve d'un certain talent dans un style d'écriture qu'il est bon dans tous. Je crois que si Foenkinos veut écrire autre chose que des comédies romantiques, il a encore du chemin à faire.

Cet article m'a paru assez juste.

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